Si la vocation de la sociologie est de faire voir le monde social autrement que ce que nous suggèrent nos sens, nos préjugés ou l'opinion courante, voici deux livres qui remplissent parfaitement leur rôle. Leurs objets n'ont pas grand-chose à voir : l'un porte sur la course à pied et plus largement sur la performance athlétique, celle spécialement des coureurs marocains ; l'autre sur la mortalité routière et plus largement sur le rapport social à la conduite automobile en France. Leurs méthodes, pour partie, diffèrent également : le travail d’observation (et même l’immersion ethnographique), essentiel dans le premier cas, était difficile à mettre à profit dans le second ; à l’inverse, dans ce dernier, le croisement des sources écrites sont au cœur de la démonstration ; par ailleurs les entretiens menés par les deux auteurs n’ont pas exactement le même statut ni la même visée, etc. Mais un point commun fondamental les rassemble : tous deux déconstruisent des représentations sociales bien ancrées et volontiers naturalisées. Des représentations qui s’adossent à une lecture purement individualiste (et parfois innéiste) du réel, et se montrent particulièrement nocives lorsque, comme dans le cas du sport, elles nourrissent des discours biologisants, voire racialisants...